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 All along it was a fever. — Noah

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Emrik L. Underbart
Emrik L. Underbart

Erre ici depuis : 03/09/2014
Âge : 15 ans depuis peu.
Missives : 352
Occupation : Collégien, mendiant à mi-temps, emmerdeur à temps plein.
DC : Tim & Eija.

Feuille de personnage
Dispo RP: Libre.
Son rêve: Succombe à la maladie le jour de son 22ème anniversaire.
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MessageSujet: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptySam 28 Fév - 13:44


All along it was a fever

The reason I hold on, cause I need this hole gone.
Funny you're the broken one but I'm the only one who needed saving.


L'hiver commençait doucement à avoir raison de la paire de chaussures d'Emrik dont les orteils pourraient bientôt rester à l'air libre en toutes circonstances. Le garçon aurait sans doute du prendre la peine de venir fouiller dans les maisons laissées à l'abandon par les habitants de la ville pendant les vacances de Noël pour tenter de remplacer ses souliers en toile qui ne le protégeaient absolument pas du froid, mais il semblait avoir d'autres priorités. Ou plutôt, d’autres préoccupations. Les derniers mois s’étaient montrés particulièrement impitoyables avec Emrik, lui rappelant ainsi que la vie ne lui laisserait sans doute jamais aucune issue jusqu’à son dernier souffle. Il avait passé des heures entières à se blottir dans des recoins improbables de Dödskalle, allant jusqu’à importuner les rares bêtes qui pouvaient errer dans la ville, la gorge souvent prise et les poumons glacés. Il avait survécu sans vraiment savoir comment. Ou peut-être qu’il s’en fichait éperdument, qu’il savait déjà ce qui l’attendait et qu’il n’avait donc aucune chance de périr dans une ruelle sombre et crasseuse. Ainsi, il y avait d’abord eu les questions bien trop précises de Damian, puis la mort d’Amilia, sans parler du mémorable épisode au marché de Noël d’Överleva où Emrik avait pris soin de jouer les gentils petits garçons en allant acheter un cadeau à Noah avec l’argent que le grand blond lui avait lui-même confié, avant d’aller s’isoler dans un coin en espérant peut-être que le vent finirait par l’emporter plus tôt que prévu. Puis plus rien. Plus de nouvelles. Pas le moindre message. Le silence le plus total.

Emrik n’arpentait plus les rues avec fierté. Ses talons étaient rangés tout au fond de son sac à dos, les lanières de ce dernier finissant généralement par glisser sur les épaules trop maigres du gamin. L’enfant fixait le sol comme s’il souhaitait y trouver une quelconque réponse à toutes ses questions. Est-ce qu’il devait vraiment rester ici ? Est-ce que ça en valait encore la peine ? Est-ce qu’il ne pouvait pas tout simplement tendre la main et sourire aux passants jusqu’à ce qu’ils lui donnent assez d’argent pour qu’il puisse aller s’acheter son dernier déjeuner ? Oui, le dernier, comme un condamné dans le couloir de la mort. Après tout à quoi bon courir après le temps. C’était une vaine et orgueilleuse course, la preuve qu’il allait finir par s’épuiser à la tâche avant de se laisser tomber, les deux genoux à terre. Alors Emrik ne pouvait pas dire qu’il n’y avait pas songé, rêvant de pouvoir enfin déposer ses armes pour s’avouer vaincu et mourir sans que personne ne remarque qu’il avait finalement disparu. C’était Timothy qui avait fini par lui faire remonter la pente sans véritablement le vouloir, sans même le forcer ou le convaincre de quoi que ce soit. Il avait suffit que l’adolescent vienne frapper à sa porte le soir de Noël par le plus grand des hasards, et la magie de cette nuit-là s’était sans doute chargée de faire le reste. Le pianiste lui avait même offert la trousse à maquillage qu’il avait découvert dans sa salle de bain en emménageant à Dödskalle, confiant à Emrik qu'il pouvait venir s’en servir comme bon lui semblait dès qu’il le souhaitait.

L’ado avait ainsi retrouvé son sourire, sa mine fière et son petit air moqueur qui lui allait si bien. Il avait coiffé sa perruque que le temps avait noirci, avant de la remettre histoire de protéger ses pauvres oreilles du froid. Il ne faisait pas attention aux trous dans son vieux pull qu’il refusait d’abandonner, tirant sans cesse sur les manches de ce dernier pour se couvrir les mains au passage. Il ne remarquait pas non plus l’humidité qui s’engouffrait dans ses chaussures. Il ne pouvait pas voir ses lèvres presque brûlées par le froid, leur couleur violacée donnant l’impression qu’il les avait recouvertes d’un rouge à lèvre à la teinte criarde et bien peu discrète. Il ne se sentait plus frémir à chaque fois que tout son corps tremblait et qu’il devait s’asseoir juste un instant pour serrer ses poings contre son ventre parce qu’il était trop fier pour aller toquer aux portes où on aurait pu l’accueillir sans opposer la moindre résistance. Il n’avait pas pris la peine d’observer son reflet plus d’une minute lorsqu’il était allé rendre visite à Lyov et qu’il en avait profité pour se passer de l’eau tiède sur son visage endormi, et quand son regard s’était posé un instant sur le miroir, il avait choisi d’ignorer la réalité. Peut-être que s’il avait pris la peine d’ôter sa fausse chevelure, il aurait pu avoir une idée très précise de ce à quoi il allait ressembler le jour de son vingt-deuxième anniversaire. Peut-être.

Mais non. Non, Emrik allait bien. Emrik marchait encore, Emrik pouvait toujours tendre la main pour faire la manche et recueillir quelques couronnes suédoises entre ses doigts tremblants. Lui, le petit prince de Dödskalle, comme Damian l’avait si justement surnommé. Encore debout, le souverain s’était donc dirigé jusque chez Noah, conscient qu’il ne serait pas forcément accueilli à bras ouverts. Mais il devait le voir. Simplement pour papoter. Ou pour lui dire qu’il avait téléchargé un bon nombre d’applications payantes sur son téléphone flambant neuf et que quelqu’un allait sûrement devoir en payer les frais… Ou juste pour croiser son regard. Oui, cela lui suffirait certainement. Le garçon sonna à la porte, repoussant les mèches blondes qui restaient sans cesse collées à son visage avant de fourrer à nouveau ses mains glacées dans les poches de son pull. « Bonne année. » Souriant jusqu’aux oreilles, il en profita pour sortir les pièces qu’il avait amassé au cours de la journée pour les tendre à Noah. « Je sais que ça fait un bail mais… Si ta proposition tient toujours, j’ai ça… Je sais pas si ce sera suffisant pour cette nuit, sinon je paierais en plusieurs fois. Ou je reviendrais demain. » Le petit prince osa enfin lever les yeux pour croiser le regard du monarque. « J’ai essayé d’envoyer des messages mais je crois que je sais vraiment pas me servir de mon téléphone… Enfin, voilà. Je me suis dit qu’on pourrait peut-être regarder un ou deux films… Si tu veux. » Il fit un effort supplémentaire pour tendre sa paume un peu plus vers l’avant, comme si l’argent dans sa main s’avérait être son seul argument valable.

Est-ce qu’Emrik revenait tout droit de l’enfer ? Non. Emrik allait bien. Emrik marchait encore.
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Noah Diesbach
Noah Diesbach

Erre ici depuis : 20/07/2014
Âge : 28 ans
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Occupation : Ancien homme de main & homme à tout faire, facteur de Dödskalle
DC : Yngve l'amoureux des cadavres et Saria, l'amoureuse de la propreté.

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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyDim 1 Mar - 13:28

Lorsque l'on y pensait, on pouvait considérer que Noah était de relativement bonne humeur.

Un contraste plutôt frappant avec le froid qui régnait au dehors. Mais c'était justement ça qui motivait le facteur de Dödskalle, s'il craignait les températures froides il ne serait jamais venu remplacer son cousin et il n'aurait pas choisi de fuir ici. C'était une bonne saison pour repartir de zéro et pour oser rêver, ou juste pour sortir et aller tapoter le verglas avec une petite cuillère et observer les fissures qui se formaient, incertaines et magnifiques. Le jardin de Noah était vide et le brouillard qui s'y promenait était du genre rassurant. Plus d'une fois, il avait ouvert sa fenêtre et il s'était installé sur les marches en bois qui menaient au jardin, sirotant son café et observant cet épais brouillard. Trop timide pour oser s'aventurer jusqu'à chez lui semblait-il, il préférait se cantonner aux arbres décharnés et morts, plutôt que de venir l'embêter. C'était louable et dans un sens, c'était plutôt apaisant à regarder. Il était facile d'être là, assis, avec sa cigarette à la bouche et sa tasse de café dans ses mains. Il laissait alors ses pensées vagabonder et tout paraissait plus simple, l'absence de Sören, les messages envoyés à Tim… Tout.

Noah ne s'inquiétait que très rarement et il ne savait pas où était son cousin mais tel qu'il connaissait Sören, cela voulait tout simplement dire qu'il n'avait pas envie qu'on le trouve. Lui et Sören étaient pareils dans le fond, si l'autre Diesbach jouait les fantômes c'était tout simplement parce qu'il n'était pas encore prêt à se parler ou à se montrer. "Mais toi, tu pourrais le trouver." avait murmuré la grand mère de Noah tandis que les deux Diesbach regardaient les flammes danser dans la cheminée. Oui, il pouvait, Noah était bon pour trouver les gens, l'exercice serait facile avec Sören vu qu'il le connaissait mais non. Peu importe ce que son cousin cachait, Noah n'allait pas aller le déterrer et le ramener de force en Suisse. Sören méritait au moins quelques semaines de répit et le bénéfice du doute. Alors oui… Noah attendait. Il attendait beaucoup de chose récemment, il attendait que son coeur se calme et cesse de se battre à ce rythme effréné à chaque fois qu'il songeait ou échangeait quelques mots avec Timothy. Il attendait minuit pour pouvoir dormir en sachant que le froid ramènerait les souvenirs de son enfance, et les mauvais rêves mais également la chaleur des bras de sa mère. Ce qui l'un dans l'autre, n'était pas si mauvais que cela, les rêves avaient juste un goût amer, entre le fantasme et le cauchemar et il se réveillait en entendant la même voix, familière, qui murmurait: Noah, Noah, Noah.

Quelqu'un pleurait dans la pénombre, quelqu'un qu'il ne pouvait pas voir, peut être que son esprit lui jouait des tours mais Noah avait depuis longtemps arrêté de vouloir comprendre et il avait accepté. Il entendait cette voix qui l'appelait et il attendait que celui qui versait des larmes la nuit vienne enfin frapper à sa porte et arrête de jouer à ce petit jeu. Il était prêt à écouter et à aider, mais qu'on ne joue pas avec ses nerfs ni ses rêves de cette façon, cela avait tendance à l'irriter. Noah fut tiré de des pensées et de sa contemplation quotidienne du brouillard par la porte d'entrée. Le blond fronça les sourcils et il écrasa sa cigarette. Il était certain de n'attendre personne, personne ne venait jamais sonner à la porte du facteur et personne ne savait qu'il était rentré en dehors de Tim. Il doutait que le pianiste brave le froid juste pour ses yeux bleus, il en doutait sincèrement. Noah finit par se redresser lentement, il passa d'abord par la cuisine pour poser sa tasse dans l'évier puis il se dirigea vers la porte d'entrée.

Emrik. Bien sûr, il aurait dû y penser.

Noah croisa les bras sur la poitrine et se cala contre l'embrasure de la porte, bloquant volontairement l'entrée, fixant le jeune garçon. Emrik n'allait pas bien. Emrik avait froid, Emrik était pâle et il avait beau se donner des grands airs avec sa perruque bas de gamme, Noah le voyait autrement. Il le voyait tremblant, il voyait les lèvres gercées par le froid et il voyait son pull troué. Noah le scruta avec une indifférence proche de la désinvolture, se disant qu'il n'aurait pas dû écraser sa cigarette. Emrik lui tapait sur le système, il avait disparu juste avant que Noah ne parte. Le blond ne s'en était pas formalisé, il avait laissé sa clé là où il la laissait toujours, se disant que le gamin aurait toujours un endroit où dormir en cas de coup dur. Et puis c'était Noël quand même, il avait bien le droit de squatter le lit de Noah le 25 décembre. Mais non, Noah savait qu'Emrik n'était pas venu et il savait que si Emrik était là aujourd'hui ce n'était pas pour lui, c'était parce qu'il n'avait pas d'autre choix et qu'il avait très certainement besoin que quelqu'un paye sa facture de téléphone, le nourrisse, lui lèche le cul au passage et lui dise qu'il était magnifique et le laisse repartir, sans se faire aucune attache émotionnelle.

Non.

Noah ne voulait pas, il avait marre de s'inquiéter pour ce crétin qui finissait par repartir dès qu'il avait obtenu ce qu'il voulait. Emrik continuait de prétendre que sa vie n'était pas ce qu'elle était et il se donnait des airs de prince parce qu'il savait que quelqu'un finirait bien par lui donner ce qu'il voulait au final."Donne moi ça." Noah prit enfin la parole et sans aucun scrupule il attrapa les pièces qu'Emrik lui tendait, les mettant dans sa poche. "Et ce n'est pas comme si tu aurais pu me joindre, je n'étais pas là… Not that you care anyway." lâcha t-il simplement avant de se pencher vers le jeune homme. Brusque au possible et sans aucune hésitation, Noah lui retira sa perruque qu'il fourra dans les mains du jeune garçon, avant de saisir le menton de ce dernier pour l'observer sous toutes les coutures. "Du ser hemsk." murmura Noah avant de finir par lâcher Emrik et de s'écarter de la porte d'entrée et d'avancer dans sa demeure. Le message était clair: suis mois et ne pose pas de questions.

"J'avais un cadeau de Noël pour toi, j'te le donne du coup vu que…" Noah haussa les épaules avant de grimper les marches des escaliers. Au premier étage, il ouvrit la porte de la première chambre et fit signe à Emrik d'entrer. C'était complètement débile mais bon, Noah ne se l'expliquait pas, il avait fait quelques petits changements. Il avait mis des draps propres sur le grand lit, et avait acheté quelques lampes afin de donner un côté confortable à la pièce. Il y avait des posters des idoles préférées d'Emrik sur un des murs, et oui, y compris Rihanna. Il y avait également une coiffeuse avec un grand miroir et quelques accessoires de maquillage étaient déjà présents. Noah ne s'y connaissait vraiment pas, il avait fait confiance à la vendeuse du magasin qui l'avait pris pour un père célibataire qui voulait faire plaisir à sa fille, ce qui... dans un sens était vrai. Non, la seule chose qui était vraiment Noah, c'était le livre qui était posé sous un des oreilles. C'était des contes pour enfant en allemand. "Voilà, c'est ta chambre, j'avais commencé après qu'on soit parti au marché de Noël mais bon… " Noah haussa les épaules encore une fois, nonchalant au possible. "Il y a à des vêtements à ta taille dans le placard, enfin je pense que la plupart devrait encore t'aller et il y a à manger dans le frigo, des trucs consistants, de la soupe tout ça. Tu fais ce que tu veux." déclara le blond avant de laisser Emrik seul.

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Emrik L. Underbart
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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyJeu 5 Mar - 12:55

Emrik tenait sa perruque entre ses doigts maigres et tremblants. La dernière fois, c’était Tristan qui la lui avait arraché sans aucun ménagement, juste parce qu’il était agacé de voir le gamin trainer dans cet accoutrement. Et il avait eu la même sensation, cette impression qu’on lui ôtait soudainement la moindre parcelle de textile qu’il avait sur le dos pour le laisser complètement nu, comme s’il ne parvenait plus à exister sans son déguisement. Peut-être que Noah en avait assez lui aussi. Peut-être qu’Emrik n’avait tout simplement plus la force de protester. Non, c’était autre chose. Il était sans voix, à se tenir là, dans l’encadrement de cette porte après que Noah ait fait demi-tour pour retourner au rez-de-chaussée, le laissant seul face à la chambre qu’il lui avait aménagé. Mais Emrik ne bougeait plus. Il contemplait la pièce de l’extérieur comme s’il n’était pas digne d’y mettre les pieds. Il ferma les yeux, comptant le plus lentement du monde jusqu’à dix, laissant ses paupières se rouvrir doucement pour constater que ce miracle n’avait pas disparu, que le rêve était bien réel et qu’il n’imaginait rien. Le gamin remonta même la manche de son pull pour venir pincer son avant-bras, ses doigts laissant une marque rouge sur sa peau diaphane juste après leur passage. Tout était vrai, palpable, tangible. Rien à voir avec les cauchemars qu’il avait l’habitude de faire, avec les songes qui le hantaient depuis des années maintenant. Emrik se tenait presque en équilibre sur ses deux pieds, craignant la chute si toutefois il avait le courage de faire un pas en avant. Non, ce n’était pas possible, il allait tomber à la renverse dans un puits sans fond et se réveiller en sueur dans les draps sales et malodorants d’un voisin bien moins accueillant. Alors il restait là, sans rien dire, comme au bord du monde.

Il finit par se décider après quelques instants, refermant aussitôt la porte derrière lui, craignant que Noah revienne trop tôt pour qu’il ait le temps de digérer cette découverte. Ses jambes furent les premières à céder, le garçon glissant doucement contre la porte pour s’asseoir finalement sur le sol de… Sa chambre. Il n’inventait rien, c’était même Noah qui l’avait dit. Mais après tout, il s’emballait peut-être. C’était trop beau pas vrai ? Il faudrait qu’Emrik paye sans doute sa part du loyer ou qu’il trouve un moyen de travailler pour pouvoir rejoindre sa chambre tous les soirs. Il n’en savait rien, il avait le temps de poser la question à Noah. Pour l’heure, il se contentait de tendre les jambes et de poser ses deux paumes contre le sol pour tenter de déterminer avec précision la matière dont celui-ci était constitué. Un léger rire lui échappa alors. À quoi bon savoir ? De toute manière il n’aurait plus à dormir là. C’était sa chambre, son matelas, son lit. Plus besoin de prier pour que son dos ne lui face pas un mal de chien après qu’il ait passé la nuit à dormir par terre. L’adolescent laissa son regard naviguer dans la pièce, cherchant assez de force au fond de ses entrailles pour pouvoir se relever et continuer sa visite. Un placard, un bureau. Emrik tenta de reprendre son souffle, faisant un pas, se déchaussant déjà pour sentir la sensation du tapis sous ses talons, riant intérieurement à l’idée qu’il n’aurait sans doute pas eu besoin de le faire tant ses chaussures étaient usées.

Le garçon n’avait pas senti la tiédeur de ses larmes sur ses joues depuis qu’Amilia était partie, le froid l'ayant même privé de cette drôle de sensation. Emrik frotta ses yeux avant de s’installer une seconde à sa coiffeuse. Il était ridicule n’est-ce pas ? Avec ses lèvres gercées, son teint blafard qui aurait réussi à faire pâlir les morts qu’Yngve recouvrait sans cesse de terre, sa perruque noircie et sa maigreur insupportable… Sa main agrippa un premier tube, riant timidement entre deux sanglots discrets en imaginant Noah en train d’acheter du mascara, des gloss de différentes teintes, du fond de teint, du vernis à ongles et une jolie gamme de fards à paupières. S’il en avait eu la force, il aurait pris la peine de se refaire une beauté sans plus attendre avant de redescendre mais non, ce n’était pas le moment. Il pouvait imaginer la réaction de Noah d’ici s’il refaisait irruption avec un large sourire déformant ses lèvres, le visage recouvert de tout ce que l’allemand avait pu lui offrir comme si sa présence ici ne se résumait qu’à cela. Il aurait le temps de faire tout ceci une autre fois, il aurait même l’occasion de trainer Noah jusque dans sa chambre pour s’amuser à mettre du rouge sur ses lèvres et du violet autour de ses yeux clairs.

Emrik se retourna à nouveau, s’aventurant jusqu’à son lit cette fois-ci, posant son sac près de sa table de chevet pour caresser les draps propres avant de grimper sur le matelas, se laissant tomber entre les coussins, le bras tendu vers les cieux pour tenter de toucher les étoiles artificielles qui flottaient au-dessus de sa tête. « Damn you Diesbach », murmura-t-il dans un souffle, agacé de constater à quel point Noah pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert. C’était tout ce que le garçon avait toujours souhaité et même plus encore. Sans parler des posters sur les murs et le bouquin qu’il avait ensuite déniché entre ses oreillers. Oh il allait apprendre l’allemand, pas de doute là-dessus. Il commencerait dès demain s’il le fallait. Il avait déjà hâte de pouvoir importuner le grand blond pour que celui-ci vienne lui lire tous ces contes avant qu’Emrik aille se coucher. Serrant le bouquin contre lui, l’orphelin imaginait déjà ses crayons éparpillés un peu partout sur son bureau, ses vêtements trainant sur le sol, sa maquilleuse restant à jamais le seul endroit un tant soit peu organisé de cette pièce. Il songeait même au journal intime qu’il pourrait commencer à écrire et qu’il viendrait ranger dans le tiroir de son chevet.

De longues minutes s’étaient certainement écoulées quand Emrik se décida enfin à sortir de sa tanière, fouillant dans la poche avant de son sac à dos avant de retourner auprès de Noah, ses yeux encore rouges le trahissant malgré lui. Il avait trouvé l’allemand dans le salon, et pour une fois, il l’avait regardé droit dans les yeux avant de s’adresser à lui. « Pardon. », dit-il simplement pour commencer. Certes, il était venu là pour profiter du confort l’espace d’une nuit en se disant que Noah n’avait que faire de sa présence sous son toit, mais il était jeune et bête et il n’avait pas vraiment pris la peine de réfléchir avant de venir frapper à sa porte. Son portable dans une main, il le posa sur la table basse sans hésiter un instant. « Tiens, j’ai fait un peu n’importe quoi avec ça… Je préfère que tu le gardes jusqu’à ce que je te rembourse. » Emrik avait rarement été aussi sérieux et il n’était pas question qu’il utilise le fameux smartphone sans avoir tenu sa parole au préalable.

Au creux de son autre paume, le véritable cadeau qu’il aurait du donner à Noah le jour de leur virée à Överleva. Pas celui qu’il avait acheté avec l’argent du blond et qu’il lui avait confié dans la voiture au retour mais bel et bien celui qu’il aurait du lui offrir depuis le début. Emrik ne se sentait pas plus courageux à cet instant précis et peut-être que ce n’était pas du tout le moment. Peut-être qu’il fallait qu’il écoute sagement les reproches de Noah et rien de plus. Tant pis, il voulait bien prendre le risque de paraître ridicule. Dans le pire des cas, que pouvait-il bien lui arriver ? Il reprendrait son sac et ses chaussures trouées et il repartirait comme il était venu. Sa main s’ouvrit doucement. « Et ça c’est… C’est un peu nul mais, je voulais te l’offrir et… Bref. C’est le médaillon que j’avais autour du cou quand j’étais à l’orphelinat. » Sur le pendentif, deux poissons formaient une ronde, une simple date gravée sur le verso. 3.3.97 « J’ai réussi à trouver une chaîne à ta taille et… Tu es pas obligé de le mettre ou de le garder hein, c’est juste… Je sais pas, je voulais juste que tu l’ai parce que c’est… C’est important pour moi. » En vérité, Emrik voulait encore s’excuser mais il n’était soudainement plus capable de dire un mot, observant la réaction de Noah, retenant son souffle en priant pour ne pas paraître trop ridicule.
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Noah Diesbach
Noah Diesbach

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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyMar 17 Mar - 20:26

Noah avait fait demi tour énervé.

Il avait descendu les marches à un rythme beaucoup trop rapide qui n'était permis que par des jambes aussi longues que les siennes et il avait ouvert une des portes vitrées qui menaient au dehors. Ce fut seulement là qu'il inspira et expira profondément, le blond espérant chasser un peu de sa colère en faisant cela. C'était complètement stupide, il le savait, mais si Noah se connaissait par coeur, il avait depuis longtemps compris que la plupart de ses réactions n'étaient pas matures ou même réfléchies. C'était bien pour toute ces raison qu'il avait mis de la distance entre lui et Emrik, afin de ne pas souiller la chambre de ce dernier avec ses mots. Et puis de toute façon… Il n'y avait strictement rien à dire, Emrik avait un toit sur sa tête à présent, un frigo bien rempli et voilà. L'histoire se terminait sur une belle note. Noah se maudissait cependant de s'être inquiété pour le gamin et d'avoir fait l'effort. Ça ne lui ressemblait pas et il se retourna pour fixer son propre reflet dans la vitre, dépité au possible en rencontrant des yeux bleus qui étaient les siens. Son irritation était juste là pour cacher ce qui l'énervait profondément et la vérité était là, il avait été enchanté à la perspective d'annoncer à Emrik qu'il pouvait vivre avec lui. Parce que comme l'idiot qu'il était, il en avait besoin. Emrik n'avait pas besoin de lui, non, Emrik avait besoin d'un peu de plomb dans la cervelle et une bonne raison de continuer de vivre. Peut être qu'il continuerait à être insouciant jusqu'à ce que la mort vienne de nouveau se pencher sur son berceau et pour l'arracher à cette vie. Il n'avait pas besoin de Noah, comme il l'avait prouvé en apparaissant sur sa porte, il pouvait survivre. C'était bien plus que ce que faisait la plupart des gens alors oui, c'était tout à fait admirable en soit.

Noah se passa une main dans les cheveux, pensif, son esprit dérivant sur un de ses nombreux paquets de cigarettes qui devaient traîner là quelque part. Le problème c'était que si Noah s'impliquait, il allait le regretter, il le savait. Emrik n'avait même pas besoin de lui, ça ne faisait aucune différence qu'il s'inquiète ou pas. Noah devait arrêter de se voiler la face et croire qu'il allait sauver Emrik avec ses deux mains à lui. Elles étaient certainement beaucoup trop abîmées pour se lancer dans ce genre de missions et puis qui était-il pour donner des leçons de morale ou même des leçons de vie à Emrik? Ses parents à lui ne lui avaient rien appris. À part peut être à survivre, à se battre pour chacun de ses souffles et croire que ce dernier était précieux. Il pouvait montrer à Emrik de quelle façon il pouvait cacher sa peur oui, lui montrer comment l'enterrer au plus profond de lui-même pour ne plus jamais y revenir. Il pouvait faire ça. Noah soupira en refermant la porte, le froid commençait à s'engouffrer à l'intérieur et il était hors de question qu'il augmente le chauffage. Non, il ne voulait pas qu'Emrik finisse comme lui, hors de question qu'il vieillisse avec toutes ses cicatrices et toutes ses blessures, non, il n'était pas obligé de finir courbé et cassé comme lui. Noah ne savait même pas pourquoi est-ce que tout ceci était important et dans le fond c'était sans doute cela qui l'irritait. Peu importe, le blonde alla s'asseoir dans son canapé, cherchant ses cigarettes entre les coussins, le besoin de fumer de plus en plus pressant. Il stoppa ses gestes lorsqu'il entendit Emrik approcher, le gamin avait une façon bien à lui de se déplacer et puis, il n'était pas encore arrivé celui qui pourrait surprendre Noah. Le suisse se redressa un peu et tourna la tête vers Emrik. Il avait pleuré pas de doute la dessus.

Mais pourquoi? De honte? De tristesse? De déception? Noah ne pouvait pas le dire, il se contenta de soutenir son regard bleuté dans celui d'Emrik, l'expression de son visage complètement vide.  "Tu n'es pas venu pendant que j'étais parti. Tu aurais pu. Regarde toi, on dirait que… Peu importe." Noah avait murmuré les derniers mots de sa phrase en allemand et il s'éclaircit bruyamment la gorge, analysant tout ce qu'Emrik venait de lui dire.  "Non, je n'accepte pas tes excuses."   dit-il tout aussi brusquement avant de se relever. Il attrapa cependant avec soin ce qu'Emrik lui tendait, le pendentif était plutôt joli et Noah n'y réfléchit pas à deux fois avant de passer la chaîne autour de son cou. Il la rangea ensuite à l'intérieur de son t shirt, tout contre sa peau, ce n'était pas vraiment son genre d'avoir des bijoux et dans ce cas précis, il comptait bien le garder avec soin. Il baissa la tête pour regarder Emrik dans les yeux avant de reprendre la parole.  

"Tes factures de téléphone tu vas les payer toi même Emrik. Trouve quelque chose à faire, je suis certain que si tu vas faire un joli sourire à la mairie ils te payeront pour faire le café et quelques photocopies." Haussement d'épaules. Il tourna la tête, où étaient ses putains de cigarettes? Noah se tourna et finit par trouver un paquet, juste là à côté de la télécommande.  "Et l'école va bientôt reprendre donc tu pourras sans doute proposer ton aide les week ends et voilà…" Enfin, il alluma le bâton de nicotine, ses deux lèvres tirèrent dessus comme si sa vie en dépendait et ses poumons se noircirent un peu plus et il se tourna de nouveau vers Emrik. Il le fixa encore,  ses deux yeux essayant presque de percer le gamin à jour. Emrik était facile à lire et Noah n'eut dû pas à faire un vrai effort. Il paraissait sincère, il était sincère et voulait le pardon de Noah.  "Tu me fatigues ça tu le sais? J'ai franchement envie de te foutre à la porte mais je ne vais pas le faire. J'espère que ça se voit que je fais des efforts parce que ça m'irrite profondément. Essaye d'aller bien okay? C'est tout ce que je peux te demander de faire pour moi. Essaye vraiment okay?" grommela le Diesbach, à bout de souffle et à bout de patience, lâchant enfin le morceau sur ce qu'il pensait vraiment.
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Emrik L. Underbart
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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyLun 30 Mar - 20:33

La rue lui avait fait oublié son âge. Ou peut-être était-ce tout simplement la vie qui lui avait joué des tours, à lui comme au reste du monde. Emrik s’était vu dormir sur des bancs glacés par le froid de l’hiver, sur des trottoirs où de vieux ivrognes étaient certainement déjà venus soulager leur vessie, sur de rares terrains où le gazon parvenait encore à survivre, auprès d’un cours d’eau où certains avaient sûrement trouvé la mort, près des grilles du collège où ses camarades étaient venus le secouer pour qu’il rentre en classe avec eux. Emrik avait tendu la main, pas pour offrir son aide ou pour espérer qu’on la saisisse et qu’on s’y accroche fermement, mais bien pour espérer qu’on vienne y cracher quelques pièces de monnaie sans grand intérêt afin qu’il se nourrisse ou qu’il puisse aller se procurer un litre ou deux de son soda favoris. Le garçon avait parfois couvert ses bras avec des vêtements qu’on jugeait féminins avant de se chausser de la seule paire de talons qu’il possédait, son pas claquant énergiquement contre le sol dur de la ville. On l’avait même pointé du doigt et on s’était attardé un peu trop longuement sur sa silhouette. Emrik n’avait jamais parlé de cette fois où on l’avait abordé en lui demandant ses tarifs, il s’était contenté de reculer en refusant les avances de ce vieux pervers dégueulasse avant de récupérer son sac et de repartir dans une autre direction. Il avait eu envie d’arracher sa perruque et de fuir loin d’ici pour trouver un endroit où il aurait pu danser dans sa tenue fétiche sans que personne ne vienne le juger, mais il savait que ce n’était pas possible.

Ainsi le gamin n’avait jamais pris le temps d’être autre chose que le petit mendiant que tout le monde croisait en ville. Il savait se débrouiller seul, oui, c’était un fait. Il ne craignait pas le froid, ni la rue, ni la viande soule qui la peuplait passée une certaine heure. Il ne craignait pas la solitude ni même l’ennui, trop habitué à se débrouiller par ses propres moyens pour ne pas perdre son temps à se morfondre sur son propre sort. Il ne craignait pas de devoir marcher pendant des heures parce qu’il avait manqué le bus qui devait le ramener jusqu’à sa ville natale. Il ne craignait pas non plus les bois, ni les chemins boueux ou le cimetière où Yngve semblait avoir élu domicile comme s'il était mort lui aussi. Payer ses propres factures et avoir un boulot ? La suggestion de Noah ne paraissait pas plus effrayante que cela et il se ferait même un plaisir de passer la journée à faire du café et des photocopies si cela voulait dire qu’il pouvait gaspiller le reste de son temps à discuter avec la secrétaire. Il pourrait aussi travailler à l’école de Dödskalle comme le grand blond lui conseillait, il y avait sûrement besoin d’un surveillant pendant le déjeuner ou d'un volontaire pour s’occuper des goûters des mômes de la ville. Et quelque chose disait à Emrik que ces derniers ne seraient sûrement pas contre un bon rouler au nutella ou quelque chose du genre…

Mais peu importait dans le fond, ce n’était pas le plus essentiel dans cette conversation, pas vrai ? Emrik se tenait là, un sourire discret suspendu à ses lèvres depuis que Noah avait saisi son médaillon et qu’il l’avait passé autour de son cou. En vérité, les yeux du gamin n’avaient pas quitté le t-shirt de l’allemand, restant accrochés à l’endroit même où son pendentif devait se trouver derrière le tissu, l’imaginant contre la peau de Noah. Il aurait presque pu en rire si la conversation n’avait pas été aussi sérieuse, réalisant enfin où se trouvait sa place après tout ce temps. Juste là, tout près du Diesbach, contre lui peut-être quand il ferait trop froid ou que le monde refuserait encore d’être un tant soit peu clément avec eux. Oui, au final, quand il serait à nouveau perdu au creux de la nuit noire et que les étoiles ne suffiraient plus à le guider, qu’il ne comprendrait toujours pas pourquoi on l’avait fait naître ici pour l’arracher à la vie seulement vingt-deux ans plus tard, il n’aurait plus qu’à mettre un pied devant l’autre pour retrouver les bras du grand blond et laisser ses larmes perler sur ses joues parce qu’il prendrait enfin la peine de les offrir. Comme tous les gamins du monde.

Le regard de l’adolescent croisa enfin celui de Noah, ses yeux témoignant toujours de la vive émotion qui s’était emparée de lui à la découverte de la chambre que l’allemand avait aménagé pour lui. Il hocha ensuite la tête, le plus sincèrement du monde, prouvant que le message était bien passé et qu’il l’avait véritablement enregistré. Encore un peu gêné de constater qu’il n’avait vraiment pas été à la hauteur durant tout ce temps, Emrik s’éclaircit doucement la gorge avant de répondre, sûr de lui malgré tout. « Promis. », jura-t-il alors simplement, plus honnête que jamais. Et pas franchement certain que Noah apprécierait le geste, il s’avançât tout de même vers lui, ses bras maigres entourant finalement la taille du facteur, se serrant contre lui sans lui demander son avis. Peut-être qu’il s’énerverait, qu’il s’agacerait en pensant qu’Emrik cherchait à changer de sujet alors qu’ils commençaient seulement à rentrer dans le vif de ce dernier, mais en vérité, le gamin ne s’en souciait guère. Il se contentait d’être là, un sourire naissant sur ses lèvres et s’élargissant presque jusqu’à ses oreilles. « Tu me les liras les histoires en allemand hein ? Comme ça je pourrais apprendre à parler comme toi et on pourra se parler devant tout le monde et personne comprendra rien… » Le garçon laissa échapper un ricanement.

La rue lui avait fait oublié son âge, mais dans les bras de Noah, il s’était enfin rappelé qu’il n’était qu’un enfant.  
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Noah Diesbach
Noah Diesbach

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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyMar 7 Avr - 20:51

Si Noah avait appris quelque chose en vingt huit ans d'existence... c'était que s'attacher était fatal. Mortel et dangereux. Ça le rendait complètement pathétique et juste... Non. Noah n'était pas fait pour poser ses yeux sur quelqu'un et pour aimer, c'était trop tout et rien à la fois, il avait besoin de contrôle. Qu'on lui dise non, qu'on lui tienne tête et lui fasse comprendre la portée de ses actes et qu'une limite ne devait pas être dépassée. Jamais dépassée. Noah avait besoin de ça plus que quiconque et ce n'était pas pour rien que son chemin avait trouvé celui des clubs des amateurs de bondage et autres vices. Le contrôle était une chose vitale dont Noah avait besoin, c'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour être réconcilié avec ses démons et accepter enfin les cicatrices qui trônaient sur son corps et qui s'effaçaient au fil des ans. Ça, c'était quelqu'un d'autre, quelqu'un d'indésirable qui avait pris le contrôle sans sa permission et ce n'était pas quelque chose qui allait arriver de nouveau, il en était plus que certain.

Mais Noah avait quitté ce monde pour une bonne raison, enfin il le croyait à l'époque, il avait été tellement heureux de sentir son coeur battre pour un peu de contact humain et véritable, il s'était cru amoureux, très naïvement. Il avait voulu suivre cet élan et le constat avait été désastreux. Alors oui, Noah avait compris depuis longtemps que s'attacher était quelque chose de mauvais. Surtout pour lui. Il savait aimer, mais pas de la bonne manière, il aimait trop ou pas du tout. Il était indifférent ou concerné et il pouvait regarder quelqu'un pour qui il ne ressentait absolument rien subir les pires horreurs sans même se sentir concerné... Et quand il voyait Emrik le fixer avec ce regard-là, il se sentait impliqué. Beaucoup trop. Il laissa la fumée s'échapper de ses lèvres, pensif, se demandant ce qu'Emrik lui en pensait de tout ça.

Hein qu'il était con à porter sa chaîne sans même poser de question? Qu'il était complètement idiot de vouloir remettre ce gamin sur ses deux pieds alors que personne ne lui avait rien demandé hein?

Noah ne prononça pas ces mots là et il se contenta de réduire à néant cette cigarette, trop rapidement, fixant toujours Emrik. Emrik qui hocha la tête, lui jurant de s'occuper de lui-même. Noah avait envie d'y croire putain,  tout comme il avait envie de croire qu'il ne se sentirait pas complètement anéanti quand Emrik échouerait. Pas sa responsabilité pas vrai? Bullshit. Emrik se rapprocha encore et Noah fut pris d'une soudaine envie de reculer, maudissant le gamin pour avoir un comportement aussi... enfantin. Mais non, Emrik en avait autant besoin que lui et Noah le laissa faire, il le laissa presser son maigre corps contre le sien. Silencieux, Noah entoura ses bras autour de la taille d'Emrik et il le serra contre lui, tentant de lui transmettre un peu de chaleur par le même temps. Bien sûr que oui qu'Emrik était son problème. Son petit problème qui respirait et qui vivait mais un problème mais un problème quand même. Noah l'écouta rire, pensif, avant de le soulever du sol, le portant dans ses bras. "Bien sûr que je t'apprendrais, enfin je vais essayer, ce n'est pas du tout naturelle comme langue tu verras, ça vient de plus bas que les sonorités anglaises ou suédoises." Marmonna Noah avant de se demander ce qu'il faisait avec Emrik dans ses bras. Oh well, il alla s'asseoir sur le canapé avec le gamin dans les bras, poussant un soupir et écrasant d'une main sa cigarette dans le cendrier qui traînait au loin. Il tourna de nouveau la tête vers Emrik, lui passant une main dans les cheveux. "Tu sais on a des règles ici, tu vas très vite le remarquer, je suis un maniaque, j'aime la propreté, ça ne me dérange pas de passer derrière toi mais il faut que tu gardes ta chambre bien rangée okay?" Noah se surprenait lui-même à parler avec cette douceur dans sa voix, un maigre sourire aux lèvres alors qu'il fixait Emrik. Il pouvait déjà s'habituer à tout ça, lui qui avait une sainte horreur de la compagnie des gens lors de ces mauvais jours... Oh d'ailleurs, il fallait en parler. "Oh et dès fois... je ne parlerai pas, mais genre vraiment pas, ce n'est pas contre toi okay? C'est juste... comme ça. Ouais, je ne parlerai pas et je m'isolerai sûrement quelque part. En général je m'assois juste sur le sol du salon et je réfléchis. Ça peut paraître bizarre mais je préfère te prévenir."

Gêné, le Diesbach se passa une main dans les cheveux, Noah n'était pas vraiment disposé à expliquer le pourquoi de la chose, il ne voyait pas effrayer Emrik après tout. "Mais pour ce qui est des contes, je te raconterai une histoire tous les jours, tous les soirs même." Et peut être qu'il lui dirait qu'en vérité il avait le livre que sa grand mère lui avait donné avant qu'il quitte la Suisse pour de bon... Peut être, Emrik comprendrait très certainement en voyant les quelques notes.
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Emrik L. Underbart
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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyLun 20 Avr - 16:17

Emrik n’avait pas bronché lorsque Noah l’avait soulevé, écoutant simplement les différences que celui-ci énonçait entre l’allemand et les autres langues, ne s’étonnant pas davantage quand le grand blond décida d’aller s’asseoir sur le canapé avec l’ado toujours contre lui. Ce dernier avait instinctivement passé ses bras autour du cou de Noah, s’agrippant à son aîné comme un singe à une branche, déterminé à l’idée de ne pas retoucher le sol et se remettre à marcher par ses propres moyens avant un bon moment. Son sourire aussi était fermement accroché à ses lèvres, et sans même y réfléchir, sa tête était venue se poser sur l’épaule de l’allemand, acquiesçant silencieusement pour montrer qu’il était bel et bien prêt à accepter les règles qui seraient imposées dans cette maison. Oh, Emrik ne se leurrait pas. Après tout, il avait quatorze ans et il avait toujours été habitué à transgresser les interdits qu’on lui avait imposé jusqu’ici, mais il savait qu’avec Noah il parviendrait à faire un effort. Il suffisait qu’il relève un peu le menton pour observer les traits parfaitement dessinés de la mâchoire du grand blond, qu’il croise son regard, et il se disait que cela en valait la peine. Juste pour ces instants là, où ils seraient complètement coupés du monde et où Emrik n’aurait plus besoin de compter le temps qui lui restait à vivre pour se donner l’impression qu’il avait véritablement vécu. Non, dans les bras de Noah, il sentait qu’il était important, qu’il avait une responsabilité, et qu’elle n’impliquait rien d’autre à part le fait qu’il devait absolument apprendre à s’occuper de lui et faire attention à ce qu’il ne lui arrive rien. Évidemment, un jour le blond serait déçu ou le plus jeune claquerait des portes pour se faire remarquer et témoigner son mécontentement. Mais ça faisait partie du jeu, pas vrai ? C’était ce qui rendait cette histoire un peu plus réelle et indispensable. S’ils cessaient à tout jamais de s’exaspérer l’un et l’autre, ce ne serait peut-être plus aussi beau.

Le garçon ne fut pas plus étonné par la déclaration qui suivit. C’était un peu comme si il s’était toujours douté de ce genre de chose en observant Noah. Il ne l’avait jamais imaginé véritablement excité comme une puce, hyperactif ou même particulièrement enjoué. Il s’était toujours dit qu’il avait l’air d’être le genre de mec qui passait son temps à lire ou à taper dans un sac, à faire des pompes ou à rester assis sur son canapé à fumer ses cigarettes en observant les volutes de fumée s'éparpiller dans l’air. Rien de tout cela bien sûr, Noah était juste un type normal qui se mettait en pause, peut-être plus fréquemment que les autres, mais cela ne choquait pas Emrik qui se contenta d’hausser les épaules. Lui aussi avait quelques habitudes qui pouvaient paraitre étranges, et il se demandait d’ailleurs si Noah n’allait pas tout simplement le surprendre un jour en train de traduire un certain nombre d’années en mois, en jours puis en minutes, juste pour repartir en tremblant dans sa chambre afin d'oublier ce qui l’attendait, posant une perruque sur le haut de son crâne et rajoutant un peu de rouge sur ses lèvres dans le seul but de maquiller la cruelle vérité. Et si ce n’était pas cela, ce serait certainement autre chose qui paraitrait inhabituel chez le jeune homme. Après tout, il n’avait pas vécu suffisamment longtemps chez qui que ce soit par le passé pour connaître exactement le genre de manies qu’il pouvait avoir dans ces cas-là. Il n’avait jamais eu sa propre chambre et la famille qui allait avec, celle-là même qui le tenait justement entre ses bras. Il ne se connaissait pas dans cette situation et aussi inquiétant et excitant que cela puisse paraître, il s'apprêtait seulement à se découvrir.

Noah lui confia ensuite qu’il lui lirait une histoire tous les soirs, Emrik réalisant alors que la confession qu’il avait faite précédemment ne le mettait peut-être pas franchement à l’aise. Il se décida enfin à relever la tête, croisant le regard de Noah à nouveau. Et sans même bouger ou prendre le temps de dire quoi que ce soit, le gamin savait déjà. Il pouvait affirmer avec certitude que le grand blond n’était pas l’homme qu’il avait vu dans son rêve. Parce que Noah était l’évidence même, quelque chose qu’il avait ressenti dès la toute première fois qu’il l’avait vu en ville. Il n’avait guère plus de onze ans à l'époque, les cheveux en bataille et les yeux toujours teintés de cette tristesse que Tristan s’efforçait de maintenir au bord de ses paupières pour attiser la pitié des passants. Il avait vu cet homme et il avait retrouvé le sourire en se disant que cet étranger avait l’air particulièrement grognon et qu’il pourrait facilement l’agacer par sa simple présence. L’enfant avait vérifié que personne ne le surveillait pour courir vers cet inconnu afin de lui demander par quel moyen il avait réussi à être aussi grand, suffisamment impressionné par sa taille pour ne pas se douter que Tristan allait revenir le chercher en lui agrippant la main et en le gratifiant d’une tape derrière la tête. Tristan avait fini par déserter près d’un an après les faits, et Emrik, toujours aussi fasciné par la taille du blond, était revenu à la charge à de maintes reprises, l’importunant dès que l’occasion avait pu se présenter. Oui, Noah était son évidence, et il n’aurait aucun regret à le quitter lorsque le moment viendrait. Ce n’était pas lui qui le tiendrait dans ses bras à l'instant où tout serait terminé, où le monde viendrait s'éteindre ; ce n’était pas ce genre d’amour qu’il avait ressenti à l’égard de l’homme qui l’avait bercé dans son rêve avant qu’il ne s’endorme une bonne fois pour toute.

Ce n’était pas Noah, alors Emrik pouvait rester.

Les mains de l’adolescent vinrent se poser doucement sur les joues de Noah, jouant distraitement avec celles-ci, ricanant du nouveau visage que cela lui faisait. « Moi aussi je fais des choses bizarres parfois. Je mets une perruque et du maquillage et des jolies robes, et les gens se moquent ou il me pointent du doigt. Mais je connais quelqu’un qui a une voix grave… » Il pressa les joues de Noah à nouveau, se moquant de son apparence et de ses traits pour le moins compressés entre ses paumes. « …Et une tête vraiment étrange… » Un léger rire lui échappa. « …Qui m’a dit un jour que ce n’était pas grave, et que c’était très bien d’être bizarre. Alors tu vois, tu peux bien rester par terre à réfléchir pendant des heures si tu veux. » Emrik haussa les épaules une fois de plus, libérant enfin le visage de Noah pour venir tendre son petit doigt devant lui, invitant le blond à l’imiter en saisissant son poignet de sa main encore libre, l’auriculaire du garçon s’enroulant alors autour de celui de Noah comme deux maillons d’une chaine. Reposant ensuite sa tête dans le cou du facteur, le collégien soupira, fermant les yeux. « On sera bizarre tous les deux et je rangerais ma chambre, c’est promis. » Hochant la tête distraitement comme s’il se confirmait tout ceci à lui-même, son doigt restait accroché à celui de Noah, la promesse inaudible qu’il ne pourrait jamais briser.
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Noah Diesbach
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MessageSujet: Re: All along it was a fever. — Noah   All along it was a fever. — Noah EmptyLun 4 Mai - 19:54

Les yeux bleus de Noah étaient posés sur Emrik et il avait un léger sourire aux lèvres en écoutant l'adolescent. C'était bien la première fois qu'il voyait Emrik comme ça. Oh, le brun se comportait toujours comme un gamin, mais c'était plus par mécanisme de défense qu'autre chose. Parce que sourire, bouder et taper du pied lui permettait d'obtenir ce qu'il voulait les trois quarts du temps. Parce que les gens se laissaient berner par tout son petit numéro très bien travaillé de gamin des rues. Noah avait haussé un sourcil la première fois que Emrik était apparu à ses pieds, le garçon visiblement admiratif de sa taille. And what the fuck do you want? L'attitude de Noah n'avait pas changé à ce moment précis, il avait toujours traité Emrik comme tout le monde et jamais comme un gamin, l'envoyer sur les roses et lui conjurant d'ouvrir les yeux plus d'une fois. Mais aujourd'hui, trois ans plus tard, les choses avaient changé. Ils avaient changé tous les deux et Noah baissait enfin sa garde et Emrik aussi car il se comportait enfin comme un gamin mais… tout simplement parce qu'il en était un. Il n'y avait pas de faux semblants et de mensonges là. Le grand blond était plus honnête qu'il ne l'avait jamais été. Il voulait qu'Emrik se sente à l'aise et qu'il reste dans sa grande chambre. Il voulait rentrer le soir et aller taper à la porte de l'adolescent et lui demander ce qu'il voulait manger. Il voulait lui faire comprendre qu'il y avait plus dans la vie que le nutella et il voulait voir sa mine déçue en apprenant qu'il ne pourrait pas en avoir. Ils se prendraient sûrement la tête pour le ménage et Noah devrait lui montrer plus d'une fois comment régler la machine à laver histoire que toutes ses chemises à lui et autres ne changent pas de couleur. Oui, Noah y avait vraiment pensé tandis qu'il faisait cette chambre.

Et le grand blond avait bloqué une demi-seconde dans l'encadrement de la porte. Son esprit avait dérivé vers Sera, leur enfant aurait eu trois et demi ce mois-ci, mais non, elle était partie, elle avait emporté ce petit être avec lui tout ça parce qu'elle avait jugé Noah indigne. Tant pis si Emrik se réveillait et était fatigué de tout ceci un jour, tant pis s'il voulait aller explorer le monde à l'âge de dix sept ans comme Noah… Il n'allait pas le retenir mais le regarder partir avec un sourire aux lèvres. Noah était venu à Dödskalle pour mourir et sans même le réaliser, peu à peu, il guérissait son coeur. Il ne savait pas quel genre d'homme allait sortir de cette expérience. Serait-il exactement comme avant? Mieux? Exactement comme son père? Cette pensée le réveillait parfois la nuit mais non, on lui avait répété tant de fois qu'il ressemblait à Mia que cela devait bien compter pour quelque chose non? Noah esquissa un sourire et il fixa un instant le petit doigt d'Emrik avant de se laisser faire. "Promis." lâcha t-il en allemand. Une vraie promesse. Noah tenait toujours ses promesses c'était un fait, ce n'était pas tellement de sa faute si sa mère était morte avant qu'il tienne cette première promesse ou si Sera avait décidé de mettre fin à ses jours. Il y arriverait très certainement avec Emrik, le petit garçon l'avait déjà vu lors de ses mauvais jours alors… Alors pas d'inquiétude à se faire n'est-ce pas? Noah pensa à cela en serrant Emrik contre lui. Le souffle chaud du garçon lui rappelait qu'il était en vie et d'une de ses mains, il lui caressa le bas du dos, le berçant lentement et gentiment sans même s'en rendre compte. "Si tu ranges ta chambre, je t'achèterai toutes les perruques que tu veux Emrik." lâcha l'allemand dans un souffle. "Et du maquillage aussi." Pas de doute que Emrik allait être plus qu'heureux dans ce magasin. Et la vendeuse que Noah avait déjà croisé également. Autant dire que le blond donnait sans compter et il savait déjà qu'il lui serait impossible de résister au sourire du Emrik.

"Est-ce que tu t'endors? Bien sûr." marmonna Noah. Il bougea légèrement mais Emrik ne broncha pas, au contraire, il se pressa encore plus contre le blond, ne désirant pas bouger. "Tu es un drôle d'animal Emrik quand même… On fait une belle paire toi et moi, et tu peux rester autant que tu veux, la rue n'est pas obligée d'être ta maison, si un de nous peut s'en sortir, ça serait pas mal…" Noah savait très bien que le gamin dormait et ce bien profondément, mais cela ne l'empêcha pas de continuer de parler. Il avait le coeur léger léger pour la première fois depuis des années et c'était une bonne sensation. "Peut être qu'un jour on ira en Suisse, ma grand mère t'aimerait bien, elle te trouverait drôle et elle a bien besoin de rire crois moi. Peut être qu'on ira aussi voir ma mère qui sait? Ça pourrait être bien, elle t'aimerait bien aussi je crois. Enfin, à sa façon. Elle me chantait toujours la même chanson pour dormir… Tu veux l'entendre? Bien sûr que oui…" Le blond finit par fermer les yeux à son tour tandis que la berceuse allemande quittait ses lèvres pour venir couver Emrik. Noah s'endormit lui aussi quelques minutes plus tard, ses bras autour de Emrik.

Le protégeant de tout.

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