Job Huntin'

My very last chance.

J'écoute la chanson de The All-American Rejects qui passe en fond les yeux fermés. J'essaie de me détendre un peu, avec tout le stress des derniers jours. Je me masse les tempes et ouvre légèrement les yeux. Oui, ma décision est prise : je vais essayer de décrocher un job au Den Helig Kräftor. Je commence à voir mes économies descendre on ne peut plus vite et avec mon absence de qualification, je n'ai pas beaucoup de choix qui se présentent à moi. Contrairement à mon père, je n'ai pas envie d'abandonner le navire car j'aime cette ville. Vraiment. Et ce n'est parce que je connais ma mort que je vais m'arrêter de vivre.

J'ouvre complètement mes yeux et me lève du canapé sur lequel j'étais allongé. Faut vraiment que je range. C'est pas mon genre d'être aussi... bordélique. Mais là, j'ai vraiment dépassé les limites - j'ai même du mal à marcher sur le sol. Je me prends une douche et me maquille légèrement avant d'enfiler un manteau et une écharpe. Les rues sont froides, mon souffle glacé étant des plus opaques et des plaques de verglas jalonnant mon chemin. Je regarde des enfants jouer dehors, sous le regard un tantinet inquiet de leurs parents. Bien que froide ça reste une bonne journée.

Le trajet n'est pas très long et j'arrive bientôt devant les portes du restaurant. Une inspiration pour me donner du courage et j'entre à l'intérieur de l'établissement. L'intérieur est vraiment classe, mais je n'ai pas le temps de papillonner. Il faut que je trouve la chef avant que le service commence. Mais, j'ai l'impression que quelque chose cloche alors même que je m'avance dans la salle : il n'y a absolument personne qui s'affaire auprès des tables. Serais-je arrivée beaucoup trop tôt?

"Excusez-moi, il y a quelqu'un?"

En attendant la réponse, je m'accorde quelques minutes pour observer en détail le restaurant. Je suis venue ici plusieurs fois étant petite. La première fois avec mon grand-père qui en avait plus ou moins profité pour m'inculquer les bonnes manières à table. Puis une deuxième fois avec mes deux parents, qui avaient légèrement abusé du vin d'ailleurs. Mais c'était toujours un bon souvenir puisqu'à chaque fois que je me le rappelais, je revoyais le sourire radieux de ma mère et ces éclats de rire dévoilant ses dents blanches. Et vient enfin la dernière fois où je suis venue ici. J'ai l'impression que c'était il y a un siècle, mais non. C'était juste la fin du lycée. Mon père qui m'avait emmené ici pour fêter ça. Seulement, ce père là n'avait plus rien à voir avec l'autre rieur. Non, celui-ci était morose et apathique mais s'efforçait tout de même sourire pour ne pas me gâcher la journée. Si je devais donner une couleur à ce souvenir, c'est gris clair. J'en ai vécu des choses ici et le restaurant a bien changé. Sauf que maintenant, j'ai une chance de faire partie intégrante de son histoire comme il a fait parti de la mienne.

Et j'espère bien pouvoir lui rendre la pareille.

Soudain, j'aperçois une lumière dans la cuisine puis une silhouette qui s'en détache - celle d'une femme. La patronne? Ce serait beau, c'est sûr. Je me dirige lentement en direction de celle-ci et tente un timide : "Bonjour...?"

"Je... je suis à la recherche d'un emploi de serveuse, j'aurais voulu savoir si par hasard vous aviez des postes libres?"